Archives par mot-clé : égalité des sexes

Reflexions autour de la journée de la Femme

Quelques réflexions sur la Journée internationale de la femme par Taiba Rahim, présidente de l’Association Nai Qala

Le 8 mars, des millions de personnes à travers le monde ont célébré la Journée internationale de la femme. Alors que c’était également le cas au cours des décennies précédentes, les célébrations se limitaient auparavant à quelques grandes villes d’Afghanistan, mais aujourd’hui, c’est un phénomène national, y compris dans les zones rurales.

En ce jour, un magnifique souvenir de ma mère me vient également à l’esprit. Elle était tout aussi courageuse que mon père.  Il y a 45 ans, elle a été honorée par la municipalité locale et a reçu un prix pour avoir fait en sorte que ses 5 fils et 4 filles aillent à l’école ; c’était très inhabituel en Afghanistan à l’époque. 

Je n’oublie jamais son humilité en recevant un bouquet de fleurs et une broche en argent. Cela m’a rendu fière et m’a inspirée quand j’étais petite fille. Des années plus tard, j’ai fondé l’association Nai Qala, qui se consacre à l’éducation des jeunes filles. Nous contribuons à ce changement de culture et de conscience. 

Bien qu’il reste de nombreux défis à relever, les filles sont désormais plus nombreuses à aller à l’école en Afghanistan, les femmes sont plus nombreuses à poursuivre une carrière et les hommes sont plus nombreux à être conscients du rôle important des femmes dans la société. Ils se tiennent plus fermement aux côtés de leurs sœurs, de leurs mères et de leurs épouses. 

Je suis très fière d’être témoin d’un tel changement et espérons que cette journée apportera une plus grande prise de conscience et contribuera à une meilleure compréhension du rôle des femmes dans notre société. C’est un honneur et un privilège d’observer et de participer à un tel changement ! 

Début des travaux à Anda

Une cérémonie officielle pour célébrer le début d’un nouveau projet de construction et marquer l’empreinte de Nai Qala par un symbole fort

L’inauguration officielle du début des travaux de la nouvelle école d’Anda s’est déroulée au mois de mai en présence des autorités et de la population locale, des parents, des étudiantes et étudiants. Cet événement représente bien la philosophie de notre association.

La construction d’une école est un pas important pour l’acquisition, par les jeunes filles et garçons, des connaissances nécessaires à leur avenir, mais c’est surtout une magnifique occasion de promouvoir le développement d’une région, les changements de mentalité entre femmes et hommes vers une meilleure égalité des chances, et ceci de manière durable. A travers ce nouveau projet, Nai Qala poursuit son engagement pour créer un impact progressif, mais profond qui influencera les interactions entre les femmes et les hommes.

Les filles démarrent symboliquement la construction

En proposant que le premier coup de pioche de l’école soit donné par deux jeunes étudiantes, Nai Qala tient à montrer l’importance des femmes dans la communauté. C’est un simple geste, mais qui est un symbole important pour l’engagement et le rôle des femmes dans la société afghane et leur dignité.

C’est par des actions simples lors d’événements solennels devant toute la communauté que Nai Qala poursuit ses buts d’améliorer l’image de la femme et montrer à la société que celle-ci ne pourra se développer qu’avec l’apport des femmes.

Le projet vient de débuter et il devrait se terminer en novembre avant l’arrivée de la neige.

Faciliter, promouvoir et faire la démonstration des droits de l’homme

Nai Qala contribue à l’amélioration de la situation des droits humains en Afghanistan

La capacité de l’État afghan à fournir des services essentiels comme l’éducation et les soins de santé et à respecter, protéger et réaliser les droits humains a ses limites. Les zones rurales isolées ont été traditionnellement négligées par les administrations centrales successives de Kaboul et aujourd’hui, ces communautés isolées ressentent particulièrement l’absence d’une réponse forte de l’État. L’absence d’infrastructures et d’institutions de base, telles que les écoles et les dispensaires, compromet la capacité de l’État à assurer un bon niveau de santé et d’éducation. Les écoles et les cliniques, là où elles existent, sont difficiles d’accès pour la plupart des gens. Le personnel de ces institutions est souvent peu formé et peu motivé. Peu d’employés formés acceptent de travailler dans des régions éloignées où les conditions de vie peuvent être difficiles. Il n’est pas surprenant que de nombreuses personnes aient quitté le pays pour tenter d’améliorer leurs conditions de vie ailleurs, et cet exode rural constant aggrave la situation pour ceux qui restent, car il affaiblit le tissu social de ces communautés.

Les femmes et les filles sont toujours privées de leurs droits fondamentaux, confrontées à de multiples restrictions et discriminations, à des abus et à diverses formes de violence, tandis que les efforts visant à améliorer la condition de la femme se heurtent à une opposition constante. Les rôles des femmes et leur potentiel en tant que contributrices au développement social et économique sont encore insuffisamment pris en compte.

 Droit à l’éducation

L’éducation est un droit de l’homme, inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant. Chaque fille et chaque garçon devrait avoir droit à une éducation de qualité afin d’avoir plus de chances dans la vie, y compris des débouchés professionnels, une meilleure santé et également de participer au processus politique. Une éducation de base est également importante pour garantir que tous les individus soient conscients de leurs droits.

En Afghanistan, 28 % des enfants d’âge scolaire ne sont pas scolarisés et seulement 18 % des filles de 15 ans et plus sont lettrées. Notre travail sur les causes profondes de la faible fréquentation ou de l’absence de fréquentation scolaire des enfants, en particulier des filles, permet de remédier à l’absence de conditions d’apprentissage décentes telles que l’absence de bâtiments scolaires adéquats, la faible qualification des enseignants, l’absence d’installations sanitaires (surtout pour les filles menstruées), l’absence de mur de séparation, tout en empêchant en même temps les enfants d’abandonner l’école, en menant des entretiens de motivation avec leurs parents et la communauté, en proposant des cours pré-primaire, en réduisant la distance qui les sépare des écoles dans les régions rurales reculées.

Droit à la santé

De même que pour l’éducation, la santé est un droit de l’homme inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, dans la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, ainsi que dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le droit de tout individu à la santé signifie que chacun a droit au meilleur niveau de santé physique et mentale possible, ce qui inclut l’accès à tous les services médicaux, aux installations sanitaires, à une alimentation suffisante, à un logement décent, à des conditions de travail salubres, et a un environnement propre.

Alors qu’en Afghanistan, 91 enfants sur 1000 meurent avant leur cinquième anniversaire, nous nous efforçons d’améliorer les conditions sanitaires en installant un centre de santé (dispensaire) qui améliore la santé des femmes et des enfants, et la couverture vaccinale et fournit les soins de base à une population de plus de 20’000 habitant-e-s. Les enseignants de Nai Qala ont reçu une formation sur les principes d’hygiène de base ; ils transmettent le message à leurs élèves et les jeunes qui participent aux cours d’éducation préscolaire apprennent pourquoi et comment se laver les mains. Plusieurs initiatives de jardinage sont encouragées pour améliorer l’état nutritionnel de toute la famille.

Donner aux gens les moyens d’exercer leurs droits

Si l’objectif principal de nos enseignants est d’enseigner aux enfants, nous voulons aussi saisir l’occasion d’aider les communautés à comprendre le concept des droits humains, ou pourquoi il est important de remettre en question les conceptions anciennes et encourager la formation des filles. Nous voulons que nos enseignants abordent des questions telles que l’éducation, la santé et l’égalité avec les anciens du village et d’autres personnes. Il faut du temps pour que les gens acceptent de nouvelles idées, mais ils ont montré un intérêt surprenant jusqu’à présent.

L’égalité des sexes, consacrée par l’article premier de la Déclaration universelle des droits de l’homme, est au cœur des activités de Nai Qala. La vision de Nai Qala est  » Une société éduquée, en bonne santé et bien équilibrée dans laquelle les femmes et les hommes mènent les changements sociaux, culturels et économiques d’une manière inclusive qui permet à leurs enfants – garçons et filles – de s’épanouir « . Notre chemin pour réaliser notre vision est inclusif, en convaincant patiemment les aînés, les pères, les hommes. Notre objectif est d’induire de petits changements dans la société en développant les capacités, les opportunités et les ressources des communautés locales afin que les hommes, les femmes, les garçons et les filles puissent participer sur un pied d’égalité à la vie et aux décisions familiales et élargir leurs domaines d’opportunités. Nous encourageons la participation des femmes dans la société, au même titre que les hommes, dans la prise de décisions sur les questions qui les concernent, comme l’éducation de leurs enfants, la santé de tous les membres de la famille et le revenu économique familial, ainsi que la participation de la communauté entière aux décisions collectives telles que la construction, l’utilisation et la gestion des écoles locales ou du dispensaire.

Les droits de l’homme sont interdépendants, indivisibles et intimement liés. Cela signifie que la violation du droit à la santé peut entraver l’exercice d’autres droits de l’homme, tels que le droit à l’éducation ou le droit au travail, et vice versa. Sans éducation, il est moins probable de trouver un emploi bien rémunéré et un logement décent, de participer au processus démocratique ou de reconnaître la valeur de l’éducation pour les générations futures. Selon la Banque mondiale, il est prouvé que les citoyens instruits se soucient davantage de l’environnement, sont plus tolérants envers ceux qui sont différents et sont plus enclins à lutter pour l’égalité des sexes. Grâce à ses initiatives éducatives et à ses actions axées sur la santé, toutes soutenues par une approche inclusive, Nai Qala s’efforce de réduire les inégalités et de promouvoir les droits de l’homme.

Education des filles, un changement d’état d’esprit

Promouvoir l’éducation des filles et les changements culturels grâce à un programme de renforcement des capacités

Améliorer la qualité de l’éducation dans les écoles que Nai Qala a construit.
Dans l’ensemble, la qualité de l’éducation en Afghanistan, en particulier dans les zones rurales, est très basse. Pour remédier à cela, l’Association Nai Qala non seulement construit des bâtiments scolaires dans ces régions isolées, mais propose aussi plusieurs classes de tutorat en sciences, et des cours de préparation au test national d’entrée à l’université. Sans ces cours, beaucoup de filles n’auraient pas pu se présenter à l’examen, les parents n’ayant pas les moyens et la motivation de les envoyer en ville pour suivre des cours particuliers.

Le rôle des enseignants de Nai Qala dans le renforcement des capacités représente beaucoup plus que le transfert de connaissances scientifiques.
Inspirée par son expérience avec les systèmes scolaires occidentaux qui favorisent une communication régulière entre les enseignants et les parents, la présidente de Nai Qala a motivé les enseignants-formateurs à établir une telle culture de dialogue. Les formateurs rencontrent les parents, souvent à la maison, pour les encourager à apporter leur soutien aux enfants. Dans les régions rurales reculées, de nombreux parents sont analphabètes et ne peuvent pas aider les enfants à faire leurs devoirs, mais ils peuvent par contre les aider en leur donnant de l’espace et en leur faisant confiance.

Les formateurs sont très conscients de l’importance du rôle des parents dans l’éducation des enfants et se sont rendu compte que ce soutien manquait à l’école. Les enseignants-formateurs de Nai Qala vont même rendre visite aux parents des élèves qui ne participent pas pendant les cours; ils marchent parfois pendant quelques heures pour trouver une maison presque isolée, dans les montagnes, avec un petit bout de terrain et quelques têtes de bétail. Quand les parents voient le professeur, ils ont d’abord un peu peur, se demandant ce qu’il attend d’eux et pourquoi il vient chez eux. Cependant, lorsque les enseignants se présentent et expliquent que cela fait partie de leur rôle de rencontrer les parents, non seulement parce que leur enfant vient en classe de renforcement des capacités, mais aussi pour féliciter les parents de les envoyer au cours. Beaucoup de parents ne peuvent croire ce qu’ils entendent et deviennent émotifs. Étonnamment, les enseignants voient très souvent une attitude différente chez leurs élèves dans les jours qui suivent la visite. Cette fille ou ce garçon vient plus tôt à l’école et interagit plus, étant maintenant conscient que ses professeurs lui donnent de l’importance.

Les enseignants prennent des initiatives pour stimuler la participation des filles en classe.
Les enseignants discutent entre eux de la participation et de l’implication des élèves dans la classe. Ils ont, par exemple, décidé de répartir dans des classes séparées deux sœurs qui étaient trop passives pendant les cours et ont encouragé leurs camarades à soutenir les sœurs. Les filles ont pleuré et ont beaucoup souffert de la séparation pendant quelques jours, mais sont ensuite devenues par la suite les élèves les plus brillantes de l’école.

Un changement d’état d’esprit des enseignants sur l’éducation des filles.
Les enseignants-formateurs de Nai Qala viennent eux-mêmes de régions rurales reculées du centre de l’Afghanistan, et sont originaires de communautés pauvres et traditionnelles. « Quand j’étais à l’école, j’ai étudié dans une classe mixte, avec des filles. J’ai toujours gardé une idée en tête: pourquoi les filles devraient-elles venir à l’école? Elles ne sont pas faites pour l’école, à quoi cela leur sert-il?  » se souvient Jawad, un enseignant-formateur de Nai Qala âgé de 26 ans. La description des tâches des enseignants-formateurs met un accent particulier sur l’éducation des filles. Les enseignants ont non seulement reçu une formation sur les droits de l’homme et des femmes, mais ils ont également été formés par le personnel de Nai Qala sur la façon d’encourager les filles et leurs parents. Jawad a raconté qu’une fois qu’il a vu une fille répondre à un problème mathématique très complexe devant la classe, sa perception des filles a été changée pour toujours: « Elle a commencé à écrire et à résoudre le problème avec compétence. Dans cette minute, je suis allé au fond de ma pensée et me suis interrogé: pourquoi étais-je si négatif au sujet des filles? Est-ce la société qui m’a influencé? Beaucoup de questions me sont venues à l’esprit et cette nuit-là, je n’ai pas bien dormi … Après cette journée, je suis devenu très déterminé d’aider les filles. C’est maintenant la troisième année que j’enseigne aux filles et les aide pour les matières scientifiques, avec mes collègues. Jusqu’à présent, j’ai aidé environ 1000 filles âgées de 12 à 18 ans. Je n’aurais jamais imaginé que je serais capable de faire mon travail avec une telle motivation. Il n’est jamais trop tard pour se rendre compte que les filles ont les mêmes talents et méritent les mêmes droits que les garçons. Je suis reconnaissant à Nai Qala de m’avoir aidé à réaliser ce point important « .

Avec le soutien de Nai Qala, des centaines de filles sont en route pour l’université. Dans l’une des régions rurales les moins développées de l’Afghanistan, cela représente un changement extraordinaire et apporte de l’espoir. Le programme de renforcement des capacités est une formidable plateforme qui permet d’apporter des changements culturels graduels dans les régions reculées et de promouvoir l’éducation des filles.

Egalité des genres

Les actions de Nai Qala visent à réduire les inégalités entre les genres.

Alors que le monde a progressé vers plus d’égalité des genres et l’autonomisation des femmes, les femmes et les filles continuent d’être victimes de discrimination dans toutes les régions d’Afghanistan. Le taux d’alphabétisation des jeunes femmes ne s’élève qu’à 57% de celui des jeunes hommes[1].  Les indices de fréquentation scolaire montrent, également et sans ambiguïté, des disparités entre les sexes, qui diminuent en fonction du niveau d’éducation (47.6% des filles fréquentent le primaire, 23.7% fréquentent le secondaire et 5.2 fréquentent l’enseignement supérieur). La part des femmes afghanes dans l’économie ne représente qu’un tiers de celle des hommes, et les indices du chômage et de la proportion de jeunes hors du système éducatif ou formatif, et sans emploi montrent une position très défavorisée des femmes sur le marché du travail.

Le fossé entre les sexes, autant dans l’éducation que l’économie, suggère que les obstacles culturels empêchent d’exploiter le potentiel de développement des filles et des femmes dans la société afghane et qu’ils restreignent leur accès à l’éducation et au marché du travail. Afin de remédier à ce déséquilibre, Nai Qala a placé l’égalité des sexes au cœur de tous ses projets. La vision de Nai Qala est une société éduquée, saine et équilibrée dans laquelle les femmes et les hommes mènent des changements sociaux, culturels et économiques d’une manière inclusive qui permet à leurs enfants – garçons et filles – de prospérer, en se concentrant sur les parties négligées de l’Afghanistan.

Faciliter l’accès à des services d’éducation et de santé de qualité
De longues distances pour se rendre à l’école et une réticence à envoyer les enfants à l’école sont de loin les raisons les plus courantes de ne pas commencer l’école; de plus, la nécessité du travail des enfants et le manque de pertinence à poursuivre les études sont les raisons les plus importantes de mettre fin aux études, des constats soulignés par l’étude nationale sur les conditions de vie (ALCS, [1]). Afin de réduire les distances à parcourir, Nai Qala s’efforce de construire ou de rénover des écoles et d’améliorer la qualité de l’éducation dans les régions reculées. Des conditions d’apprentissage décentes et plus accessibles ainsi que de meilleurs services éducatifs sont une grande motivation pour les enfants à aller ou retourner à l’école. L’école de Katawaie illustre parfaitement l’impact d’un nouveau bâtiment sur l’inscription des enfants à l’école: après son inauguration, l’école de Katawaie a été victime de son propre succès puisque le nombre de filles a augmenté de 25% et que de nouvelles classes ont dû être ouvertes dans la cour de l’école. Un impact similaire a été constaté à Zeera Gag où initialement l’école a été construite pour 520 filles mais où on  en dénombre de 650 aujourd’hui.

L’une des conclusions les plus importantes de l’ALCS est que le principal problème du système éducatif afghan n’est pas tant la rétention et l’abandon, mais surtout le commencement de l’école. Nai Qala a mis en place des cours d’éducation de la petite enfance dans deux villages et prévoit d’en ouvrir de nouveaux. Les cours d’éducation de la petite enfance aident non seulement les garçons et les filles à développer leur imagination, leurs talents et leur confiance dès le plus jeune âge, mais leur apprennent aussi à jouer ensemble, de manière inclusive, comme une habitude normale. Les attitudes, les comportements et les expériences nouvellement acquis chez les jeunes enfants contribuent à leur réussite scolaire à long terme et réduisent les taux d’abandon scolaire. Le programme de la petite enfance met également l’accent sur les mères, en les impliquant activement dans la classe. Un tel programme a un impact particulier sur la famille. Les mères développent leur confiance et, plus important encore, une conscience de la façon dont elles peuvent éduquer leurs jeunes enfants pour contribuer à un environnement familial plus sain.

Selon l’ALCS, 70% des femmes qui ont eu un bébé en Afghanistan au cours des cinq dernières années ont eu au moins un examen prénatal. Cependant, seulement 16 pour cent ont reçu quatre examens prénataux, le nombre recommandé par l’organisation mondiale de la santé pour les grossesses normales. Encore une fois, la distance jusqu’à un centre de santé peut être un facteur contribuant à la faible utilisation des services de santé, mais ce n’est pas le seul. Les hommes ayant des problèmes de santé peuvent se rendre en ville pour se faire soigner dans un hôpital, mais la situation des femmes malades ou enceintes est plus difficile. Une femme malade doit être accompagnée à l’hôpital par une femme et par un parent masculin. Certains problèmes de santé nécessitent un séjour prolongé à l’hôpital et certains nécessitent un suivi médical pendant des mois. De plus, les familles sont souvent réticentes à payer des frais d’hospitalisation prolongée. Par conséquent, les femmes ne se rendent tout simplement pas dans des hôpitaux éloignés. Considérant ce fait, Nai Qala Association a construit un centre de santé de base, à Nawur. Le pourcentage de naissances assistées par du personnel de santé qualifié augmente chaque année; pour la seule année 2017, 126 bébés ont vu le jour, en toute sécurité, dans le centre de santé de Nawur. Le dispensaire profite à 20’000 personnes et a transformé les conditions de santé et les habitudes d’hygiène dans la région, tant pour les femmes que pour les hommes.

Mener le changement en donnant l’exemple
L’Association Nai Qala vise à contribuer au changement culturel en Afghanistan. La présidente de l’organisation, Taiba Rahim, est un modèle dans un pays où le leadership féminin est encore rare [2]. Montrer aux filles que le changement est possible et que les femmes ont un rôle important à jouer est crucial pour l’avenir du pays. Il y a une plus grande participation féminine dans les projets de Nai Qala que dans tout autre projet similaire dans la région. Les femmes ont vu que les projets de Nai Qala sont proposés et menés par une des leurs, ce qui fait toute la différence pour elle. La force nouvellement acquise et la confiance en soi ont incité les femmes du village reculé de Sokhtagi à créer un conseil des femmes, le tout premier conseil des femmes non seulement dans le district, mais certainement aussi dans toute la province.

Tous les employés locaux de Nai Qala reçoivent une formation sur les droits de l’homme et l’égalité des genres. Chaque membre du personnel incarne les valeurs de l’organisation par l’exemplarité de sa pratique et de ses actions, au bureau et sur le terrain. Les enseignants-formateurs sont devenus les meilleurs ambassadeurs de Nai Qala pour promouvoir l’éducation des filles, en discutant avec la communauté ou en motivant les parents en faisant du porte-à-porte.

Offrir aux femmes et aux filles un accès égal à l’éducation, aux services de santé, à un travail décent et à la représentation dans les processus décisionnels peut alimenter des économies durables, et profiter aux familles et aux communautés dans leur ensemble. L’égalité des genres est non seulement un droit humain fondamental, mais aussi la base d’un pays pacifique, prospère et durable. Toute petite amélioration vers l’égalité des genres peut apporter de grands changements dans l’état d’esprit et profiter à l’ensemble de la société.

 

[1] Tous les chiffres proviennent de l’étude des conditions de vie en Afghanistan (« Afghanistan Living Conditions Survey » – ALCS) 2016 – 2017, publiée le 7 mai 2018 par l’organisation centrale des statistiques de la république islamique d’Afghanistan http://cso.gov.af/Content/files/Surveys/ALCS/Final%20English%20ALCS%20Highlight(1).pdf

[2] Le pourcentage de femmes occupant un poste de direction ne représente que 6.6% de celui des hommes (ALCS, 2018).

Un dispensaire mettant l’accent sur les femmes

Dans le projet du dispensaire de Nawur, les mères et les bébés sont la cible prioritaire de Nai Qala.

Alors que les hommes ayant un problème de santé peuvent se déplacer en ville pour se faire traiter dans un hôpital, la situation des femmes est beaucoup plus difficile, surtout dans les régions isolées du centre de l’Afghanistan. Lorsqu’elle est malade, une femme doit toujours être accompagnée à l’hôpital par au moins une parente et un homme de la famille. Si elle a de enfants, elle doit les laisser chez elle pour se faire soigner. Certains problèmes de santé nécessitent un séjour de longue durée à l’hôpital et d’autres peuvent exiger un suivi médical de plusieurs mois. Les familles hésitent ainsi souvent à payer les frais d’une hospitalisation prolongée ce qui peut retenir les femmes de se déplacer jusqu’au dispensaire ou un hôpital éloignés. L’absence d’un centre de soin à proximité devient un facteur élevé de mortalité infantile et maternelle et c’est une des raisons pour laquelle l’association Nai Qala a construit le dispensaire de Nawur.

Inauguré en novembre 2011, le dispensaire compte aujourd’hui 11 employés fournissant des services de santé pour un bassin de population de 20 000 personnes. Depuis sa création,  plus de 60’000 consultations ont été données, dont plus de 11’000 dispensées à des enfants et 750 bébés y ont vu le jour (données de décembre 2017).

L’ Association Nai Qala est fière d’avoir été en contact direct avec le Ministère de la Santé Publique depuis le début du projet.  Le partenariat d’origine courait de 2012 à 2016, mais, étant en contact étroit avec le Ministère, l’association a saisi l’opportunité de s’engager dans le difficile processus de sélection couvrant la période de support 2015 à 2020. Les efforts ont porté leurs fruits et l’administration du dispensaire de Nawur a été officiellement transmise au Ministère de la Santé en juin 2015. L’exemple du centre de santé de Nawur a été cité dans de nombreuses réunions officielles et a montré qu’il était possible de fournir des services de santé à l’une des régions les plus isolées d’Afghanistan.

Les femmes de la région de Nawur sont généralement  à la tête d’une famille nombreuse; il est même rare de voir, dans les régions rurales, un couple ayant moins de cinq enfants. La plupart des familles en ont davantage, et il n’est pas inhabituel d’avoir jusqu’à 12 enfants. Compte tenu des limitations économiques pourquoi les parents ont-ils donc de si grandes familles? Le taux de survie infantile est faible, et on peut aisément comprendre que les parents décident d’avoir de nombreux enfants afin d’augmenter les chances que certains puissent vivre. De plus, les soins très limités, à la fois pendant la grossesse et pendant la période post-partum, font courir des risques aux mères et aux nouveaux nés.

Diminuer ou éliminer les risques réduit, chez les parents, l’angoisse de la mortalité infantile et, par conséquent,  permet de limiter le nombre de grossesses. La présence d’un dispensaire est indispensable à la réduction de ces risques omniprésents.

En 2017, 3156 femmes et 1022 enfants ont été vaccinés au dispensaire. Quelque 13 000 visites ambulatoires ont eu lieu pour toute une série de problèmes de santé qui, sans centre de soin, seraient restés sans traitement jusqu’à ce qu’ils soient devenus beaucoup plus graves.  Les dossiers du centre recensent 125 cas de malnutrition grave recevant des soins médicaux; en outre, quelques 175 patients de Nawur ont été redirigés vers d’autres établissements de santé pour un traitement plus spécialisé.

Les populations locales apprécient la valeur du dispensaire– davantage de femmes et de bébés survivent – et chacun est déterminé à en profiter.

 

Les femmes s’engagent

Inspirées et motivées par l’exemple de la fondatrice et présidente de l’association Nai Qala, les femmes de Sokhtagi ont créé un conseil des femmes.

Impressionnées de voir qu’une femme afghane pouvait mener un projet dans leur région et inspirées par la fondatrice et présidente de Nai Qala, des femmes ont décidé de prendre leur destin en main.

À l’automne 2017, les femmes du village de Sokhtagi ont créé «l’association du conseil des femmes». C’est une première, sous cette forme, non seulement dans le village et dans le district,  mais certainement aussi dans toute la province de Bamyan.

Santé et alphabétisation en priorité

L’objectif d’un conseil féminin est de proposer un forum de discussion où chacune peut partager ses idées en toute confiance.  Les femmes sont conscientes que si elles veulent pouvoir participer aux décisions, elles doivent être claires et précises dans leurs revendications. La santé et l’alphabétisation des femmes sont les priorités du conseil.

Création du conseil

Il y a quelques mois Momena, la cinquantaine, mère illettrée de 7 enfants, grand-mère et femme de berger a eu la révélation de créer un conseil de femmes afin de répondre à leurs problèmes spécifiques. Ce besoin de rassembler les femmes est parti du constat qu’un groupe avait plus de poids qu’un individu isolé; forte de cette idée, Momena a donc commencé à rassembler les femmes.

Le premier passage de la présidente de l’association Nai Qala à Sokhtagi a été un élément déclencheur pour Momena. Elle a accompagné la présidente dans chacune des réunions avec la communauté et été inspirée par le leadership de Taiba Rahim et par les tâches distribuées à la communauté.

L’une des tâches confiées à la communauté a été de préparer le terrain pour la construction de l’école. Momena a pris sur elle de faire du porte à porte et de rassembler assez d’argent afin de louer le bulldozer qui permettrait à la communauté d’aplanir le terrain. Grâce à sa force de persuasion, Momena a pu assurer à elle seule le financement. Ce premier succès lui a permis non seulement de gagner la reconnaissance de la communauté et le respect des hommes mais aussi d’envoyer un message fort aux femmes, afin qu’elles la rejoignent dans son projet.

Lors du passage de la présidente de Nai Qala, en décembre 2017, les femmes discutaient des statuts et choisissaient les membres du comité de l’association nouvellement créée. Momena a engagé quelques étudiantes de l’école comme trésorière, porte-parole ou encore secrétaire de la nouvelle association du conseil.

Une source de motivation

La construction d’une école par l’association Nai Qala apporte, dans un village,  non seulement des opportunités de développement pour les enfants mais aussi force et confiance à la communauté, et en particulier pour les femmes.

Momena  a exprimé sa gratitude à Taiba Rahim, présidente de l’association Nai Qala: “Merci d’avoir amené du changement dans notre village. Votre présence parmi nous, la façon dont vous vous adressez aux hommes représente beaucoup pour nous. Cela m’encourage pour convaincre les femmes de me rejoindre. »

Nous avons constaté une plus grande participation des femmes aux projets de l’association Nai Qala que dans n’importe quel autre projet similaire mené dans la région. Les femmes ont vu que les projets de Nai Qala sont proposés puis dirigés par une femme, ce qui fait toute la différence pour elles.

 

Grâce à Nai-Qala, les filles peuvent suivre des cours d’appui pendant l’hiver

Des filles de l’école de Zeera Gag sont hébergées dans des familles d’accueil le temps de suivre les cours hivernaux d’appui scientifique.

À la mi-décembre, les enseignants-formateurs de Nai Qala se sont rendus au village de Zeera Gag, où l’Association Nai Qala a construit une école en 2015, pour lancer une nouvelle édition du cours de renforcement des capacités.

Nai Qala avait déjà exécuté ce programme dans le village de Zeera Gag l’hiver dernier, pendant les vacances scolaires. Il était destiné à plus de 200 filles. Mais chaque semaine, le nombre de filles participant au cours diminuait progressivement; en effet, de nombreuses filles vivent dans des villages reculés où les risques d’avalanche  sont élevés et les conditions météorologiques difficiles. Toutes les filles qui ne pouvaient pas assister au cours étaient très déçues.

Cet été, de nombreux parents déterminés et qui partageaient la déception de leurs filles ont approché des familles vivant à proximité de l’école de Zeera Gag. De nombreuses familles ont accepté qu’une jeune fille puisse vivre avec eux pendant 3 mois, ce qui correspond à la durée du cours de renforcement des capacités. En compensation de l’hébergement de leur fille, les parents ont donné du blé ou du fromage aux familles d’accueil.

Quelques jours avant le début du cours, plus de 10 filles âgées de 16 à 18 ans vivaient déjà dans leur nouvelle maison, en attendant avec impatience l’arrivée des enseignants de Nai Qala.

Pour cette année, 160 filles sont attendues au cours de renforcement des capacités.

Pour en savoir plus sur le projet de renforcement des capacités, cliquez ici.

Créer des emplois

Nai Qala procure des emplois à des jeunes diplômés des villages

Zewar est une jeune femme diplômée de l’école Nai Qala en 2012 et qui a eu la chance d’étudier à l’université pendant quatre ans. Elle est maintenant de retour dans son village et dirige le programme d’éducation de la petite enfance après avoir reçu une formation spéciale grâce au soutien de la Fondation Agha Khan, à Kaboul. Zewar est fière de son rôle et parle avec gentillesse et patience.

Zewar comprend l’importance du programme d’éducation de la petite enfance pour les enfants de sa région. Elle sait, tout comme sa collègue, elle aussi allée à l’université grâce à l’éducation reçue dans une école Nai Qala, que les enfants ont besoin de plus que la simple maîtrise de la lecture et de l’écriture.